jeudi 21 mars 2013


Les mauvais choix des dirigeants français


En reprenant l’évolution du PIB en France depuis 2008, le chiffre de 0,4%/an en moyenne reste « flat » comparé aux 2,4%/an sur la période 2002-2008 (soit +452 Mds€) et aux 3,2%/an entre 1992 et 2002 (+441Mds€) (source Eurostat) mais correspond aussi à une évolution somme toute prévisible de l’économie française par l’introduction en janvier 2002 d’une monnaie de 6 fois supérieure à celle de son économie! Si en effet nous nous reportons aux chiffres de l’Eurozone sur les mêmes périodes, la monnaie unique a eu un impact sur le PIB global de -1,3%/an en moyenne depuis 2008 et de 0,9%/an depuis 2003 à l’exception de l’Allemagne dont le PIB évolue à + 2,9%/an depuis 2008 et à + 1,24%/an en moyenne depuis 2003 !!!!
Le PIB étant une valeur toute relative incluant d’une part les revenus des acteurs économiques nationaux et non nationaux mais également ceux des personnes publiques (en soit plus délicat à mesurer), l’évaluation optimum d’une économie tient in fine à l’étude de sa balance commerciale.

La balance française des biens et services est atone voire déficitaire depuis pratiquement une dizaine d’années. Il faut remonter à 2004 pour avoir une balance positive à +9Mds€, celle-ci étant négative depuis culminant en 2012 à -43Mds€ (dont une perte de 10Mds€ entre 2010 et 2012!) et nonobstant des facteurs positifs tels que la baisse de l’Euro (passant de 1,59USD en 2008 à 1,35USD en 2013) et du brut (cours du Brent de 140USD en 2008 à 108USD en 2013) soit un déficit pour les marchandises de -60Mds€ en 2012 et ce, malgré un excédent des services de + 18Mds€ (contrairement à l’Allemagne déficitaire de -24Mds€ !), excédent se retrouvant à l’échelle de l’Euro-zone à +98Mds€, montant culminant à +252Mds€ (biens et services) principalement portée par l’Allemagne (+152Mds€). 

Ces simples constats révèlent la prégnance de l’Allemagne portant par son industrie la balance commerciale européenne au contraire de la France ayant opté pour l’abandon conscient de ses usines et pour une économie de services faiblement créatrice d’emplois valorisés voire valorisants (pour faire simple « on quitte Renault ou Valeo pour McDonald ou Manpower » !).

Ces chiffres soulignent par ailleurs la mauvaise direction de nos entreprises (multinationales notamment) avérée d’une part par la médiocrité des échanges extérieurs des années avant l’entrée de la France dans l’Euro-zone et d’autre part par l’adoption idéologique (cf l’amitié franco-germanique) d’une monnaie appréciée de six fois la valeur de notre économie, la preuve étant une balance des marchandises à -1,50%/an PIB contre +6,75%/an PIB pour l’Allemagne entre 2000 et 2011 (in fine +0,6%/an PIB pour l’Euro-zone).

Le PIB de la France est donc stagnant car le ressort de la croissance à savoir le commerce des marchandises reste déficitaire. Tant que les domaines couverts par l’industrie se rétréciront, des barrières douanières aux frontières sur les produits importés n’y feront rien. Même si la question de la monnaie reste importante, elle n’est que secondaire dans une politique surréaliste prônant la tertiarisation de notre économie. Une dévaluation permettrait certes d’améliorer à la marge la compétitivité-prix mais n’éludera pas les décisions de réinvestissements productifs autrement dit la question de la valeur ajoutée.

Les recommandations de baisses de coûts du travail (charges patronales, salaires, flexibilité du contrat CDI) ne sont en fait que des prétextes de reconstitution des marges perdues par la baisse de compétitivité d’un capital productif assis sur des options financières à court terme de retour sur investissement encouragées non seulement par les établissements financiers bailleurs de fonds mais aussi par le double abandon par l’Etat de ses prérogatives d’orientation de politiques industrielles et de son rôle de correcteur des inégalités au profit des classes populaires et moyennes,  une répartition des richesses se traduisant désormais par une fiscalité de moins en moins progressive et une baisse de la dépense publique.

La France ne peut se permettre à l’instar des USA d’un déficit commercial chronique (-437Mds€/- 540Mds USD contre 558Mds USD en 2011 et -357Mds€ en 2010) ne bénéficiant ni d’une monnaie internationale dont le change est constamment ajusté par des politiques de prophylaxie monétaire (Quantitative Easings), ni de bailleurs de fonds tels que la Chine en contrepartie d’importation massive de produits à bas prix (230Mds€ de déficit  commercial en 2009, 273Mds€ en 2012 !), ni a fortiori de sa position de gendarme du monde.

Une baisse du coût direct ou indirect du travail aura donc le triple effet d’une reconstitution des marges des entreprises, d’une baisse des recettes fiscales et in fine d’une augmentation de la dette celle-ci n’étant maîtrisée ni à court ni à moyen terme tant la dimension anxiogène de la baisse de la dépense publique et des nécessaires transferts budgétaires vers l’UE (MES, Plan de sauvetages, libéralisation sauvage intra-européenne) n’est comprise. 

Le dernier point reste en effet la politique absurde de la BCE dont le bilan poursuit sa dégradation d’une part par la mise en collatéral d’actifs douteux des banques et d’autre part par le refinancement bon marché de ces dernières non pas pour relancer le crédit à une économie en récession mais pour palier à des comptes détériorés par un trading nocif de spéculation.  Le double mouvement de refinancement et d’une mise en dépôt des banques dans les comptes de la BCE permet ainsi à Draghi de contrôler une masse monétaire prise entre une hausse des prix par les coûts (cours du Brent sur une tendance longue, spéculations sur les matières premières) et le recul du PIB. En dépit d’une politique à vue en dehors de toute légalité, la Banque Centrale a vu son bilan doubler depuis 2007 pour atteindre 32% du PIB de l’Euro-zone au risque de provoquer une défiance des investisseurs sur  l’Euro et à terme l’hyperinflation.

La création monétaire est donc active mais non compensée par une destruction corrélative, les dettes tant des banques que des entreprises ou des Etats n’étant pas remboursées: seule une augmentation du taux directeur de la BCE motivée par une stagflation (inflation par les coûts et récession)  pourra rétablir la confiance dans l’Euro et attirer les bailleurs étrangers, la question des perspectives économiques se reposant.   

Le risque d’hyperinflation est-il pour autant réel à court terme ? Il le sera si le PIB de l’Euro-zone accentue sa baisse autrement dit si la balance commerciale de l’Allemagne se dégrade sur les marchés émergents. Aidée par des produits à forte valeur ajoutée et présente tant dans la sphère économique russe qu’en Chine ou en Amérique Latine, l’Allemagne restera performante qu’elle reste ou sorte de la zone euro.